Ouvrage Le droit musulman 2 édition 2007 François-Paul Blanc

Ouvrage Le droit musulman  2 édition  2007  François-Paul Blanc

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Chapitre préliminaire

Les sources du droit musulman

La pensée démocratique que la volonté du nombre peut faire la loi, en s'exprimant par les differents modes de suf frage, est une idée qui n'a jamais pénétré l'islam. En terre musulmane, la loi doit être respectée parce qu'elle est la volonté du pouvoir et que cette volonté reflète ou incarne celle de Dieu: l'ordre légal, en Islam, repose done sur le Coran, qui est une Révélation, et sur l'exemple de Mahomet, indiqué par les hadith ou traditions orales qui représentent le commentaire de la Révélation. L'ensemble des hadith ou traditions constitue la Sunna ou Voie droite. La réunion des prescriptions de la Sunna et du Coran forme la Loi, dite Shar ou Shari'a, c'est-à- dire la Route

(section 1 Les sources sacrées).

Lorsque ces deux premières sources se révéleront insuffisantes ou contra- dictoires, la création législative s'imposera sur le fondement de la Révélation et de son Commentaire. Deux sources dérivées de la Sharía font alors leur apparition l'udjima, assentiment de la Communauté, et le Kryds, déduction analogique (section

2- Les sources dérivées de la Sharťa). À partir du x siècle la créa tion législative se tarit, suscitant l'apparition, dans les inter- stices du Shar', de nouvelles sources de normes juridiques: la coutume et la jurisprudence (section 3 Les sources sponta nées). Dans les pays musulmans où un pouvoir central s'est très tôt établi et maintenu, c'est le règlement (kanan), décret ou ordonnance du souverain, qui pourvoira aux besoins nou- veaux, préparant l'avènement, dans l'État musulman, de la loi,

Les sortes du drod murulaue

10 expression de la technique législative moderne (section 4 - Le könûn).

Section 1 Les sources sacrées

Le Coran (Kor'an, proclamation), parole d'Allah, transmise au Prophète en des révélations successives, par l'entremise de l'ange Gabriel, est la source mère, la Loi de l'lslam dans sa forme originelle. Sur cette hase première de la religion musul mane s'élèvera une doctrine de devoirs envers Dieu et envers les hommes. La Loi de l'Islam, comme la Loi de Moïse, réunit ainsi religion, morale et droit. Il y a en Islam une liaison intime entre la naissance et la formation de la religion et le dévelop pement du droit; il est imposible de les séparer (1). Le Coran cependant ne permet pas, à lui seul, l'intelligence de l'Islam.

Dès le lendemain de la mort de Mahomet il a fallu régler la vie interne de la Communauté. Plus tard il faudra donner aux musulmans établis dans des pays lointains des directives pour ordonner les relations entre l'Islam conquérant et les peuples soumis, suivant des rapports de droit jusque-là inconnus en Ara- bie. Désireux d'élever sur la religion un système de gouverne ment, les premiers dirigeants vont alors se tourner vers le Pro phète et rechercheront sa volonté, exprimée par ses dires, ses actes, ses comportements. À côté du Coran apparait ainsi une deuxième source, qui est un premier développement de la Loi écrite: source qui n'est plus de révélation, mais source sacrée cependant car d'inspiration divine (11).

1- Le Coran

Le Livre (Kitab) se compose de 114 sourates (rat) ou cha pitres, divisés eux-mêmes en 6219 versets (ayat, signes miracu leux), phrases ou ensemble de phrases exprimant une ou plu sieurs pensées complètes. Il est inutile d'y rechercher un groupement par matières, procédant d'un ordre logique ou his

Les searces de hit museinan

torique. Le classement des sourates a été opéré suivant leur lon 11 gucur, en commençant par une sourate d'ouverture (fätiha), qui, elle, est très brève. A l'intérieur de chaque chapitre les versets se succèdent sans aucun lien. La conservation littérale de la parole de Dieu a été entourée de précautions particulières. A la suite de chaque Révélation, le Prophète confiait le texte, tel qu'il l'avait retenu, à la mémoire des Compagnons ou en faisait prendre note écrite sous sa dictée. Après la mort du Prophète, Abu Bakr ordonna une révision du texte pour mettre fin aux variantes et une recension des documents pour en éviter la perte, irréparable après la disparition des mémoristes. Ceux qui savaient le mieux le Coran se mirent à l'ouvre.

Ils réunirent le texte en un cahier (mushaf) qui demeura entre les mains d'Omar, deuxième calife; la fille de ce dernier, Hafsa, veuve du Prophète, l'aurait ensuite déposé sur le tombeau de son époux. La fixation defi nitive du texte serait l'œuvre d'Othman, troisième calife, et d'al- Hadijdjadj, entre les années 35 et 75 de l'hégire. Chaque ver set est une énonciation (khitab) portant injonction (taklif) par ordre (am) on défense (nahy). De tout verset du Coran nait ainsi un haku, décision analogue à un jugement, qui est une règle légale particulière.

La Loi de l'Islam n'a pas pris naissance dans des principes, mais dans des décisions isolées, intervenant à point nommé pour résoudre une difficulté, mettre fin à un litige. Le texte explicite (saw) oblige le croyant à une obéissance absolue; qui conteste est un mécréant (kufir), qui désobéit est un dévoyé (fäsik). Dans son ensemble, le Livre a été jugé par Allah lui-même comme une œuvre parfaite: Aujourd him, j'ai rendu votre Religion parfaite. J'ai parachevé ma grace sur vous, j'agrée P'lilara comme étant votre religion (Coran, V-3). Nous n'avons ren négligé dans le Lieve (Coran, VI-38). Nous avons fait descendre le Litve sur toi, comme un éclaircissement de toute chose (Coran, XVI-89). C'est le miracle de l'i'dje, impossibilité pour

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